Intervention sur le décret relatif au décrochage scolaire
Intervention de Mme Stéphanie Cortisse, Députée (MR), sur la proposition de décret relative à la réduction du décrochage scolaire et à la lutte contre l'absentéisme des élèves (doc. 709 (2023-2024))
Depuis 2020, à sept reprises, j'ai interrogé Mme Désir en commission de l'Éducation au sujet de la lutte contre le décrochage scolaire, lutte qui constitue une priorité pour mon groupe.
Le Pacte pour un enseignement d'excellence prévoit une diminution de 50 % du décrochage scolaire d'ici 2030. Or, selon les derniers chiffres que j'ai obtenus, ce phénomène a explosé depuis la crise sanitaire et a augmenté de 90 %. Ce constat est d'ailleurs inscrit dans les développements de la proposition de décret: «Le phénomène reste plus marqué que dans d'autres systèmes scolaires et […] il serait même en passe de présenter des évolutions inquiétantes.» Dès lors, il aurait été indispensable d'accélérer les travaux du chantier n° 13 du Pacte, consacré à la lutte contre le décrochage scolaire.
Il est dommage de faire aboutir le présent texte en toute fin de mandature, par la voie d'une proposition de décret que nous avons dû signer et déposer à la place de la ministre, en urgence et dans de telles circonstances. D'autant plus que le texte conditionne la délivrance des subventions du Plan de relance européen. Madame la Ministre, je vous ai demandé ce matin, en commission, de pouvoir obtenir une comparaison des taux d'absences injustifiées sur les cinq dernières années scolaires. Je regrette de ne pas les avoir reçus.
Ensuite, vu la complexité et l'usine à gaz que constitue l'écosystème des acteurs qui interviennent dans la lutte contre le décrochage scolaire, nous nous demandons en quoi le présent texte va concrètement améliorer cette lutte. En réalité, ce texte prévoit surtout de référencer l'absentéisme, ce qui est une bonne chose. Mais permet-il réellement de lutter contre le décrochage? De plus, n'était-il pas possible de simplifier et de rationaliser davantage cet écosystème pour renforcer son efficacité?
Le monitoring systématique des absences injustifiées est nécessaire. Une nouvelle application métier «APP100» va être créée à cet effet. Il est prévu que toutes les écoles bénéficient d'une gestion informatisée et systématique des absences. L'évolution de l'absentéisme injustifié sera suivie plus rapidement et en continu. Cela guidera les mesures d'accompagnement envisagées par le nouveau schéma.
Par ailleurs, au regard de la complexité du texte, comment les acteurs auront-ils le temps de l'intégrer avant la prochaine rentrée d'août 2024? Ensuite, comment avez-vous tenu compte de la surcharge administrative des écoles dans l'élaboration du présent texte?
En outre, des opérateurs de terrain me font part d'un phénomène de décrochage actif, mais aussi passif. Or, le présent texte n'aborde pas cet aspect et je le regrette.
Ensuite, il est étonnant de ne pas avoir lié la présente réforme à celle des centres
PMS. Ces derniers seront-ils capables, en termes de moyens humains et budgétaires, d'assumer les nouveaux rôles qui leur seront attribués?
Il est positif d'avoir prévu un volet relatif à la prise en charge des élèves majeurs en situation d'absentéisme, en envisageant la définition d'un projet personnel en dehors de l'enseignement obligatoire si cela est approprié, et ce, en collaboration avec des acteurs de l'orientation, comme la cité des métiers et le Carrefour emploi formation orientation (CEFO), de l'enseignement de promotion sociale et de la formation professionnelle et, le cas échéant, de l'accompagnement par les services publics de l'emploi. Toutefois, l'exposé des motifs du présent texte indique que tout cela nécessitera évidemment des accords de coopération avec les Régions.
Enfin, nous soulignons positivement le renforcement des passerelles entre les mondes de l'éducation et de l'aide à la jeunesse.
Madame la Ministre, les membres du groupe MR vous ont posé des questions
auxquelles vous n'avez pas répondu. Ils ont également posé des questions aux
députés PS. Ceux-ci y ont répondu, parfois vaguement, alors que nous avons cosigné ce texte. Il ne faut pas se leurrer: on assume la situation. La proposition
de décret est un copier-coller de votre projet de décret, Madame la Ministre, que
vous n'avez pas réussi à faire passer avant la fin de la mandature.
Pour une fois, Monsieur Kerckhofs (PTB), vous avez raison. La situation est très particulière. Vous avez parlé de surréalisme à la belge; c'est le cas quand on voit
des partis qualifiés de démocratiques se permettre de faire une majorité alternative avec votre parti d'extrême gauche, en revenant sur une réforme de
l'enseignement supérieur (le décret Paysage) qu'ils ont pourtant votée en 2021, tout ça pour des raisons purement électorales. La seule et unique raison pour laquelle nous avons
accepté de signer et de déposer le présent texte la semaine dernière, en transformant le projet de décret en proposition de décret, c'est parce que, malgré le
coup de poignard dans le dos de nos soi-disant partenaires de majorité – il n'y a
plus de majorité, on l'a bien vu aujourd'hui –, le MR est un parti responsable.
Le présent texte fait partie des deux textes qu'il était indispensable de voter
pour que les fonds du Plan de relance européen ne soient pas bloqués, non pas uniquement au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles, mais aussi au niveau de la Belgique. Nous le voterons donc.