Question sur la valorisation des langues régionales endogènes en FWB
Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Bénédicte Linard, Ministre de la Culture, à propos du suivi de la valorisation des langues régionales endogènes en Fédération Wallonie-Bruxelles
Mme
Stéphanie Cortisse (MR). –
Madame la Ministre, je vous ai déjà interrogée à plusieurs reprises concernant
la valorisation des langues régionales endogènes en Fédération
Wallonie-Bruxelles.
Pour
rappel, le Conseil de la langue française, des langues régionales endogènes et
des politiques linguistiques a mené une enquête sur la vitalité de ces langues.
Au mois d'avril dernier, alors que la publication du rapport détaillé était
attendue pour le premier trimestre 2023, vous me précisiez que le Service de la
coordination statistique et de la recherche avait achevé les phases de
nettoyage et de croisement des données brutes; que celles-ci furent récoltées
par un institut de sondage auprès de 5 000 répondants et que l'interprétation
et la présentation des résultats – réalisées avec l'appui du Service des
langues régionales endogènes (SLRE) et d'experts réunis au sein d'un comité
d'accompagnement – étaient toujours en cours. La publication d'un premier
rapport de recherche était donc désormais prévue pour la fin du mois de juin,
tandis que les données complètes devaient être publiées et présentées ce mois
de septembre. Cette enquête a pour principale mission d'établir un état des
lieux objectif de la vitalité des langues régionales endogènes en Fédération
Wallonie-Bruxelles. Dans un second temps, l'analyse des résultats doit
permettre d'identifier et de planifier des mesures destinées à renforcer cette
vitalité.
L'analyse
de cette enquête est-elle à présent finalisée? Pourriez-vous en présenter les
conclusions et nous communiquer la copie du rapport complet? Avez-vous pu, sur
la base de cette enquête, identifier et planifier des mesures en vue de
renforcer la vitalité des langues régionales endogènes en Fédération
Wallonie-Bruxelles? Quelles sont ces mesures? De quelle manière et selon quel
calendrier allez-vous les concrétiser?
Par
ailleurs, qu'en est-il de la valorisation des langues régionales endogènes en
milieu scolaire? En 2020, le Service de recherche sur le wallon de la Haute
École de la ville de Liège (HEL) et le SLRE de la Fédération Wallonie-Bruxelles
ont mené une enquête sur les langues régionales à l'école. Parmi les 110
enseignants ayant répondu à cette enquête, 23 ont animé moins d'une fois par
mois dans leurs classes des activités en lien avec les langues régionales; 11
au moins une fois par semaine et 4 au moins une fois par mois. Les 72 autres
répondants ne l'ont jamais fait, mais aimeraient le faire. Selon le rapport,
cette question montre une marge de progression possible dans l'espace occupé
dans les classes par les langues régionales. À la question «avez-vous
l'impression de manquer de ressources pour aborder ces thématiques?», 64
enseignants ont répondu oui; 18 non. Par ailleurs, il ressort de l'enquête que
les enseignants ont très peu recours aux centres de documentation spécialisés.
Des conclusions provisoires de cette enquête, il ressort que les langues
régionales sont surtout évoquées en troisième, cinquième et sixième années
primaires. Le plus souvent, il s'agit de préparer une récitation, une pièce de
théâtre ou une chanson dans le but de présenter un spectacle. Les enseignants
estiment manquer souvent de ressources pour travailler ces matières, mais
semblent méconnaître les centres susceptibles de leur venir en aide. Les types
de ressources qu'ils aimeraient le plus utiliser sont des séquences prêtes à
l'emploi, des jeux et des ressources multimédias.
Deux recommandations ressortent de ce rapport. La première est qu'une action simple serait de mieux communiquer sur l'existence de centres de ressources. La seconde concerne la conception d'outils. Le travail du service de recherche sur le wallon de la HEL se concentrera donc sur les attentes des enseignants et non, comme initialement prévu, sur des ressources pour un public préscolaire. L'enquête permet donc de mieux rencontrer les attentes des acteurs de terrain.
J'ai
interrogé la Ministre Désir à ce sujet lors de la réunion du 4 juillet dernier
de la Commission de l'Éducation. À cette occasion, j'ai insisté sur le fait
qu'il s'agit non pas d'un cours de langue de wallon, mais de la sauvegarde de
notre patrimoine culturel en dispensant aux élèves quelques notions, en les
informant et en les sensibilisant à l'existence des différents dialectes
régionaux. Cela pourrait se faire notamment dans le cadre du cours d'éveil aux
langues ou encore du parcours d'éducation culturelle et artistique (PECA). La Ministre
m'a répondu que, pour ce qui relève de l'enseignement obligatoire, la
plateforme e-classe pourrait très utilement accueillir de telles ressources.
Elle reconnaît que le PECA se prête à soutenir ce type d'activités et que le
référentiel du nouveau cours d'éveil aux langues constitue une autre porte
d'entrée qui pourrait être utilement exploitée. Mme Désir a encore ajouté que
toutes ces pistes pourraient être approfondies, mais qu'elle vous laissait le
soin, en votre qualité de Ministre de la Culture, d'apprécier leur pertinence
et d'engager, le cas échéant, les collaborations nécessaires avec elle et avec
l'Administration générale de l'enseignement (AGE).
Madame
la Ministre, quelles sont les conclusions définitives de cette enquête sur la
valorisation des langues régionales endogènes en milieu scolaire? Quelles
suites y avez-vous réservées? Comment le Gouvernement concrétisera-t-il les
recommandations? Entamerez-vous une collaboration à ce sujet avec l'AGE et avec
la Ministre Désir pour rappeler aux enseignants l'existence des centres de
ressources en langues régionales endogènes; pour faire figurer ces derniers sur
la plateforme e-classe, ainsi que pour développer et mettre à la disposition
des acteurs de terrain de nouveaux outils pédagogiques dans ce domaine?
Mme
Bénédicte Linard, Ministre de la Culture. – Madame la Députée, la Direction de la
recherche du Secrétariat général publiera le rapport de l'enquête en question
le jeudi 28 septembre 2023. La version complète du rapport sera alors rendue
mise à la disposition du public. Les résultats de l'enquête seront présentés
aux membres de l'instance d'avis compétente, c'est-à-dire le Conseil de la
langue française, des langues régionales endogènes et des politiques
linguistiques, lors de sa séance plénière du lundi 9 octobre. Le Conseil sera
invité à émettre un avis et des recommandations sur la base de ces données.
Le
Service de recherche sur le wallon de la HEL n'a pas transmis de conclusions
supplémentaires. Sans préjuger de l'avis de ce partenaire et compte tenu des
limitations dues à l'échantillon, l'AGC émet des réserves quant à la
possibilité de poursuivre l'exploitation de ces données. En ce qui concerne la
communication aux enseignants vis-à-vis de l'existence des centres de
ressources en langues régionales endogènes, leur présence sur la plateforme
e-classe et le développement de nouveaux outils pédagogiques à cet égard, il
est à noter que des ressources pédagogiques – dont la conception a été soutenue
par la Fédération Wallonie-Bruxelles en 2019 et 2020 – figurent déjà sur la
plateforme e-classe sur la base d'une initiative du SLRE. Quant à la nécessité
de sensibiliser les enseignants à ce sujet, le Service général des lettres et
du livre (SGLL) a prévu d'inclure une publicité spécifique dans le kit adressé
aux écoles dans le cadre de l'édition 2023 de l'opération «La Fureur de lire». Cette
publicité sera centrée sur le programme intitulé «Langues et cultures
régionales en classe», désormais reconnu dans le cadre du PECA, ainsi que sur
son adéquation aux objectifs fixés par la brochure «Éveil aux langues». Pour le
développement de nouveaux outils, les opérateurs du secteur ont la possibilité
de solliciter des soutiens à l'édition. Deux demandes de ce type ont reçu un
avis favorable de la Commission des écritures et du livre en 2022. Un cahier
destiné à faciliter l'exploitation en classe de l'une des plaquettes «Fureur de
lire» dédiées aux langues régionales endogènes est en cours d'élaboration et
devrait paraître d'ici le mois de décembre 2023.
Mme
Stéphanie Cortisse (MR). – Madame
la Ministre, votre réponse me laisse perplexe. En effet, la Ministre Désir
affirme que la plateforme ne présente pas encore d'informations sur le sujet et
propose de collaborer avec vous à ce sujet. Vous me répondez quant à vous que
les informations y figurent déjà. Je vous crois bien évidemment, mais cela
signifie que cette plateforme est méconnue. Dès lors, ne serait-il pas utile
d'envoyer une circulaire aux écoles?
Selon
la Ministre Désir, cette démarche vous incombe. Il serait peut-être judicieux
d'écrire à l'AGE et à la Ministre Désir pour les inviter à envoyer une
circulaire aux écoles et leur rappeler ainsi l'existence de ces ressources qui
figurent sur la plateforme e-classe. Les enseignants peuvent y avoir recours
dans le cadre du PECA et du cours d'éveil aux langues. Ce serait une bonne
chose.
À ce
sujet, j'aimerais évoquer la plateforme Apprentis Citoyens. Celle-ci existe
depuis longtemps et accueille des débats politiques organisés par des
organisations de jeunesse (OJ) politiques francophones. À ma demande, la Ministre
Désir a rappelé l'existence de cette plateforme dans une circulaire parue hier.
Il convient parfois de rappeler certaines informations aux écoles, car
celles-ci reçoivent beaucoup de circulaires qu'elles ne lisent pas forcément.
En l'occurrence, cela rappellerait aux enseignants l'existence d'activités
destinées à valoriser les langues régionales endogènes. Je ne manquerai pas de
suivre l'évolution de ce dossier avec vous et la Ministre Désir.