Question sur l'aide administrative supplémentaire pour les directions

05/03/2024

Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, à propos de l'aide administrative supplémentaire pour les directions de l'enseignement fondamental

Mme Stéphanie Cortisse (MR). – L'avis n°3 du Groupe central prévoit, en ce qui concerne les directeurs d'école, de passer progressivement d'une gestion administrative et multitâches à un leadership éducatif et pédagogique. Or, paradoxalement, les directions que je rencontre lors de mes visites de terrain sont quasiment unanimes pour dire que leur charge administrative ne cesse d'augmenter. De plus, d'une école à l'autre, d'un pouvoir organisateur à l'autre, les aides administratives aux directions du fondamental varient fortement.

Pour rappel, les montants nécessaires à la mise en œuvre du dernier protocole d'accord sectoriel 2021-2024 ont été inscrits au budget, aussi bien à l'ajustement du budget de 2022 qu'au budget initial de 2023. À cet égard, nous avons salué avec mon groupe le renforcement du soutien administratif aux directions de l'enseignement fondamental, à savoir une augmentation de 2,6 millions d'euros en 2022 et de 7,8 millions d'euros à partir de 2023, ce qui porte le montant total de l'aide à 45 millions d'euros.

Madame la Ministre, vous aviez annoncé, dans le cadre de la définition des modalités d'affectation de ces moyens, que la piste de la création d'un cadre organique assurant un véritable soutien administratif structurel aux directions allait être approfondie. Le but était également d'intégrer une forme de souplesse, de manière à répondre à diverses situations spécifiques, telles que les directions avec charge de classes ou la mutualisation des moyens entre des écoles de petite taille.

Vous avez sollicité une enquête et chargé les différentes fédérations de pouvoirs organisateurs de réaliser, via les pouvoirs organisateurs, un cadastre des membres du personnel engagés actuellement dans le cadre de l'aide spécifique sur la base du décret du 2 février 2007 fixant le statut des directeurs et directrices dans l'enseignement. À l'époque, je regrettais que ce cadastre ne comprenne pas aussi les membres du personnel administratif engagés sur fonds propres, car cela aurait permis d'avoir une vision globale de la manière dont les pouvoirs organisateurs et les écoles sont aidés de manière administrative.

Le 14 mars 2023 en commission, vous annonciez le prochain dépôt d'un texte réglementaire au gouvernement. Au lieu de cela, vous avez publié le 26 avril la circulaire 8906, intitulée «Aide spécifique aux directions d'écoles 2023-2024 – Nouveaux montants forfaitaires 2023-2024 – Modalités de conversion de l'aide spécifique en périodes pour les directions avec classe». Il est précisé que l'enveloppe continuera d'être répartie suivant les modalités connues jusqu'ici, moyennant une augmentation forfaitaire par élève.

Le 6 juin 2023 en commission, vous me précisiez que plusieurs rencontres avaient eu lieu avec les fédérations de pouvoirs organisateurs et Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE), ainsi qu'avec les représentants des organisations syndicales, y compris les représentants du personnel administratif et ouvrier des écoles (PAPO). Ces rencontres avaient été l'occasion de discuter de plusieurs scénarios opérationnalisant la création d'un cadre organique structurel. Toutefois, vous ajoutiez que l'exercice n'était pas simple puisqu'il requérait de concilier des objectifs qui ne convergeaient pas forcément.

Vous indiquiez que les réflexions n'étaient pas assez avancées pour aboutir à une modification du système en vue de cette année scolaire 2023-2024, mais que le chantier de la création d'un cadre organique administratif et éducatif restait toutefois ouvert et que les scénarios mis en discussion jusqu'ici avec les acteurs continueraient à être creusés. Par ailleurs, un groupe de travail spécifique sur la mutualisation des moyens avait été instauré.

Madame la Ministre, où en sont vos travaux relatifs à la création d'un cadre organique administratif et éducatif pour les directions de l'enseignement fondamental? Où en sont les discussions du groupe de travail spécifique sur la mutualisation des moyens?

Pourriez-vous nous présenter les différents scénarios qui sont sur la table et nous dire lequel est finalement retenu? Pourriez-vous nous présenter un calendrier pour la concrétisation de ce chantier? Sera-t-il appliqué à la prochaine rentrée?

D'autres mesures sont-elles en discussion pour diminuer la charge administrative des directions, en particulier dans l'enseignement fondamental, pour dès lors leur permettre de se consacrer à leur mission principale de leadership éducatif et pédagogique? Qu'en est-il de l'aide éducative régulièrement demandée par les acteurs de terrain?

Enfin, 45 directions bruxelloises ont signé une carte blanche relative à cette surcharge administrative. Ce ne sont pas les premières. Avez-vous rencontré ce collectif? Quelles réponses leur avez-vous apportées?

Y a-t-il une objectivation des tâches administratives des directions? On a pu objectiver les heures de travail des enseignants, avec le Pacte. Le même travail est-il envisagé pour les directions?

Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation. – Le 16 janvier dernier, je vous ai indiqué recevoir régulièrement les représentants des associations de directions des différents réseaux d'enseignement fondamental. Notre dernière rencontre a eu lieu le 15 février dernier, quelques jours à peine avant la publication de la carte blanche à laquelle vous faites référence.

Concernant les revendications liées à la révision de leur statut, je les ai informés du fait que leur demande relative à la fiche de paie sera opérationnelle à la rentrée prochaine. Celle-ci exprimera bien leur régime de prestations en 36es plutôt qu'en 24es ou en 26es. Mes services finalisent la mise en œuvre de cette mesure qui nécessite un important travail d'encodage.

Concernant le soutien administratif et éducatif, je leur ai confirmé que plusieurs scénarios visant à créer un cadre organique avaient déjà fait l'objet d'une réflexion approfondie avec les acteurs institutionnels. L'exercice n'est pas simple, car les fédérations de pouvoirs organisateurs ont différents points d'attention qui ne convergent pas nécessairement. Nous cherchons évidemment à répondre au mieux à ces différents points pour éviter des effets négatifs sur le terrain. Et pour évaluer tout risque d'effet négatif de ce type, certaines fédérations de pouvoirs organisateurs ont demandé au gouvernement de prendre le temps de l'analyse et de ne pas finaliser le texte durant la présente législature. Le gouvernement a entendu cette demande de report, mais les travaux ne sont pas pour autant abandonnés, bien entendu. Mon objectif est d'aller le plus loin possible dans la détermination du modèle pour pouvoir alors avancer rapidement dès le début de la prochaine législature.

Je vous rappelle que l'augmentation de l'enveloppe a bien été mise en œuvre pour un montant de 7,8 millions d'euros, dès la rentrée 2023, comme le prévoit le protocole d'accord sectoriel adopté par le gouvernement le 5 mai 2022. Ce financement complémentaire n'était prévu ni par la Déclaration de politique communautaire (DPC) ni par le Pacte pour un enseignement d'excellence. C'est donc un acquis majeur de cette législature, qui porte le soutien total aux directions de l'enseignement fondamental à 45,6 millions d'euros depuis le début du Pacte.

D'autres mesures donnent de l'air aux directions de l'enseignement fondamental. Je pense aux mesures actées par le gouvernement, à mon initiative, visant à assouplir l'entrée en vigueur du dossier d'accompagnement de l'élève (DAccE) et le volume de la grille horaire du tronc commun à Bruxelles et dans les communes à facilités.

Plus structurellement et à travers les différents niveaux, les travaux menés dans les chantiers du Pacte ont permis le développement de l'outil informatique, améliorant significativement la gestion de la carrière de membre du personnel, comme MODE, GEDI, ACCITRAV ou Mon Espace, ainsi que l'organisation interne des écoles, comme le DAccE, E-recours, e-pôles ou l'outil d'aide à la décision (OAD).

Toujours en vue de soutenir le quotidien des directions, un projet spécifique au chantier n°17, dédié à la simplification administrative, a permis de réduire le nombre de circulaires et d'en améliorer la qualité et la lisibilité, qui faisaient l'objet de critiques régulières. Un travail est en cours concernant la refonte de la circulaire de la rentrée, qui est aussi très longue. D'autres pistes sont envisagées par le chantier, notamment formulées dans le cadre participatif du Pacte et du groupe de travail pour la concertation «Administration-Représentation des directions» (GT Dirlof), qui rassemble les services de l'administration et les représentants des directeurs. L'étude sur le temps de travail des membres du personnel offrira de nouvelles perspectives, car elle permettra d'obtenir un meilleur aperçu des tâches et du temps de travail des directions.

J'ai évidemment bien conscience que la mise en œuvre du Pacte engendre une charge administrative nouvelle et parfois importante pour les écoles, et en particulier pour les directions. Je rejoins évidemment leur volonté de consacrer plus de temps aux tâches pédagogiques et relationnelles. La poursuite de la dématérialisation, le développement du principe Only Once ou encore une analyse plus systématique des conséquences administratives de chaque nouveau dispositif pourraient contribuer à soulager davantage leur quotidien.

La réussite de la réforme systémique de notre système éducatif dépend évidemment de la soutenabilité des changements qu'elle induit, ainsi que de l'adhésion des acteurs de terrain. J'ai toujours été et je resterai encore attentive aux malaises qui sont exprimés face aux évolutions d'envergure touchant les habitudes de travail et l'organisation des écoles. Cette préoccupation restera au cœur des travaux du Pacte. Le gouvernement a d'ailleurs invité les coprésidents du Pacte à intégrer pleinement le travail d'établissement du calendrier des réformes à venir, qui devra être soumis aux acteurs de l'enseignement, puis au prochain gouvernement.

Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Il est dommage que la question de la création d'un cadre organique pour apporter un soutien administratif structurel aux directions n'ait pas été tranchée. Je comprends que cela ne soit pas facile, mais il est regrettable que ce dossier soit reporté à la prochaine mandature. Pour le reste, que ce soit maintenant ou au cours de la prochaine législature, il faudra drastiquement réduire cette charge de travail administratif. Nous le répétons, des mesures concrètes pour ce faire devront être prises dans les réformes du Pacte pour un enseignement d'excellence. Les directions n'en peuvent plus, surtout dans l'enseignement fondamental. Ce n'est pas qu'un slogan: nous devrons agir concrètement.

Madame la Ministre, j'ai par ailleurs été contactée par une agente administrative d'une école communale, dont je vous ai transféré le courriel. Le cadre organique que l'on créerait permettrait en parallèle de changer le statut du personnel administratif engagé, par exemple, par un pouvoir organisateur communal qui, comme cette dame, ressent une inégalité de traitement par rapport aux autres réseaux, à l'enseignement secondaire et aux autres membres du personnel. Elle n'a ni les mêmes congés ni la même charge horaire. La réflexion sur le statut de ce personnel doit avancer.