Question sur le manque de pluralisme dans la représentation étudiante (suivi)
Question orale de Mme Stéphanie Cortisse à
Mme Valérie Glatigny, Ministre de
l'Enseignement supérieur, à propos de la participation et la représentation des
étudiants dans l'enseignement supérieur
Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Madame la Ministre, je vous interroge à nouveau à propos du décret du 21 septembre 2012 relatif à la participation et à la représentation étudiante dans l'enseignement supérieur, dont vous avez sollicité en septembre 2020 une évaluation auprès de l'Académie de recherche et d'enseignement supérieur (ARES) et de la Direction générale de l'enseignement supérieur (DGES).
Le 6 mai dernier, vous me précisiez que, les 19 et 20 mai, vous deviez encore rencontrer la FEF, mais aussi les conseils étudiants indépendants, pour recueillir leurs avis et propositions. Dans le même délai, les directions des établissements d'enseignement supérieur étaient invitées à donner leur avis par la voie d'un questionnaire.
Il s'agissait de la phase finale de l'évaluation du décret que l'administration devait, en principe, vous remettre pour le début de ce mois de juin. Vous ajoutiez que vous examineriez alors la pertinence d'une réforme avant la prochaine rentrée de septembre.
Qu'est-il ressorti de vos concertations avec les acteurs précités? Disposez-vous à présent des résultats de l'évaluation du décret par l'administration? Dans l'affirmative, pourriez-vous les présenter? En avez-vous conclu qu'une réforme dudit décret était pertinente? Pouvez-vous déjà m'en dire plus?
Mme Valérie Glatigny, Ministre de l'Enseignement supérieur.- L'évaluation menée par l'administration depuis le mois de septembre 2020 est le fruit d'un travail approfondi. Ce travail multidisciplinaire s'est intéressé à l'histoire de la représentation étudiante, à la philosophie du décret du 12 juin 2003 définissant et organisant la participation des étudiants au sein des institutions universitaires et instaurant la participation des étudiants au niveau communautaire et du décret du 21 septembre 2012 relatif à la participation et la représentation étudiante dans l'enseignement supérieur, aux objectifs respectifs de ces décrets ainsi qu'à une comparaison internationale à laquelle 21 pays ont participé. L'administration a analysé le financement des organisations représentatives des étudiants et des conseils étudiants ainsi que les données relatives à la participation aux élections étudiantes et à la présence des représentants étudiants au sein des différents organes et instances. Elle a également opéré une comparaison avec les missions du décret du 26 mars 2009 fixant les conditions d'agrément et d'octroi de subventions aux organisations de jeunesse.
Dans ce cadre, tous les intervenants ont été consultés: l'unique organisation représentative des étudiants au niveau communautaire, les conseils étudiants affiliés et indépendants, les établissements d'enseignement supérieur ainsi que les commissaires et délégués du gouvernement.
Les établissements ont été consultés par voie de questionnaire entre le 5 et le 19 mai. Ils ont été nombreux à participer puisque 5 universités sur 6, 15 hautes écoles sur 19 et 8 écoles supérieures des arts (ESA) sur 16 ont remis une réponse. Les questions adressées aux établissements concernent leur ressenti par rapport aux missions fixées par le décret, leur avis sur la formation et l'information des représentants étudiants, les moyens humains et financiers qu'ils offrent aux conseils étudiants, la participation aux élections et les moyens de l'encourager, la relation entre le conseil étudiant et l'établissement, la participation des représentants des étudiants dans les organes où ils siègent et l'attention réservée aux demandes desdits représentants. Une question ouverte invitait également les établissements à faire part de leurs propositions et bonnes pratiques. Les réponses ainsi obtenues sont nombreuses et riches d'enseignements: plusieurs bonnes pratiques de formation et d'information des représentants étudiants ont été identifiées et des propositions ont été formulées, notamment pour une meilleure reconnaissance des délégués de cours. Par ailleurs, quelques établissements ont pris des initiatives pour susciter une plus grande participation. Ils ont également identifié certaines lacunes du décret actuel: les principales remarques visent la lourdeur du processus électoral, la surcharge de travail que cela occasionne pour les représentants étudiants et l'absence de pluralisme au niveau communautaire.
Mon administration a également rencontré les représentants de la Fédération des étudiants francophones (FEF) et ceux des conseils étudiants indépendants, à savoir l'Université de Liège (ULiège), l'Université de Namur (UNamur), la Haute École Galilée et l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles.
Elle a rencontré les représentants des conseils étudiants le 19 mai et ceux de la FEF le 20 mai. La FEF a expliqué qu'elle a lancé une réflexion à la suite du congrès qu'elle a tenu au début du mois de mai; d'après la FEF, ce congrès a permis de dégager un consensus autour de l'unicité du mouvement étudiant. Les conseils étudiants indépendants, quant à eux, ont formulé de nombreuses propositions. Ils demandent une réforme qui permettrait d'assurer une forme de représentation des conseils étudiants. Ils proposent notamment la création d'une structure unique représentant l'ensemble de la communauté étudiante et ses différentes tendances ou encore des comités sectoriels propres à chaque type d'enseignement. Les propositions évoquent également des aménagements raisonnables et un renforcement de la formation et de l'information des représentants étudiants.
Le travail accompli par l'administration est le fruit de longs mois de recherches et d'échanges avec tous les acteurs concernés et d'autres pays. Il a permis de tirer plusieurs conclusions. D'abord, le modèle de représentation et de participation en Fédération Wallonie-Bruxelles est unique au sein du réseau Eurydice à l'exception de ce qui se fait en Flandre. Ensuite, le décret fige une situation dans laquelle deux acteurs coexistaient - La FEF et l'Union des étudiants de la Communauté française (Unécof) - sans offrir un cadre dynamique évolutif. Par ailleurs, le taux de participation reste faible dans chaque type d'enseignement puisqu'il oscille entre 25 et 37 %. Les conditions de reconnaissance sont trop strictes que pour permettre l'émergence d'une nouvelle organisation de représentation communautaire. En outre, le calendrier électoral et le système contradictoire sont très contraignants. Une autre conclusion est le déficit de formation des représentants étudiants. Enfin, l'évaluation a mis en exergue l'existence d'une volonté commune de la FEF et des organisations de représentation communautaire indépendantes de travailler à une plus grande unicité de la communauté étudiante par la création d'une structure unique dans le respect du pluralisme.
Prochainement, je proposerai au Gouvernement un projet de décret qui veille à répondre aux enjeux identifiés par cette évaluation et qui intégrera les propositions des acteurs du décret. Les différents acteurs, en ce compris la FEF, pourront bien entendu faire valoir leurs propositions et leurs observations au cours du processus d'élaboration du projet de décret.
Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Je vous remercie, Madame la Ministre, pour l'ensemble de vos réponses, en particulier pour la présentation de l'évaluation que vous avez menée avec votre administration, en concertation avec l'ensemble - j'insiste sur «l'ensemble» - des acteurs du secteur depuis le début de cette année académique.
Les conclusions de cette évaluation rejoignent donc le constat que je posais déjà en septembre dernier. Comme elle est organisée actuellement, la représentation étudiante en Fédération Wallonie-Bruxelles manque de pluralisme et de représentativité.
Je ne manquerai pas de suivre la réforme de
ce décret que vous allez prochainement entamer et
de formuler certaines propositions. Je vous remercie encore pour votre travail dans ce dossier qui
me paraît crucial.